Comment punir son chien

Préambule : ne punissez pas !

Il est toujours préférable, pour des raisons d’éthique et d’efficacité, de ne pas laisser votre chien faire quelque chose, plutôt que de le laisser faire et le punir en conséquence. 1

Dans ce qui suit, on dira aussi bien “faire quelque chose” que “produire un comportement”, c’est la même chose.

Si votre chien ne produit pas un comportement, il n’a pas de raison de l’apprendre, et toutes les raisons de l’oublier. De même, pour que votre chien apprenne à ne plus faire, il doit commencer par…ne pas faire !

Si vous faites en sorte que votre chien ne fasse pas ce comportement que vous ne voulez pas, alors vous vous mettez, tous, en situation de réussite ! C’est plus agréable pour tout le monde, et quand on réussit, on apprend mieux…

Si vous choisissez délibérément de laisser votre chien faire quelque chose pour le punir ensuite, cela relève d’une “pédagogie” plutôt malveillante, même si elle est répandue dans notre société. Heureusement, il est toujours possible de procéder autrement…

Punir, c’est quoi ?

La punition, en termes éducatifs, n’a qu’un objectif : que le chien apprenne à ne plus faire le comportement visé.

La punition peut aussi servir d’exutoire à nos propres émotions : colère, peur, frustration… mais soyons bien clairs : ce volet de la punition n’a aucune valeur éducative !
La seule chose que votre chien apprend alors, c’est à avoir peur de vous…vous êtes devenu effrayant pour des raisons qu’il ignore.

Comment punir alors ?

Quand punir, quand ne pas punir ?

D’abord, il y a un temps pour punir.
Le chien ne peut faire une association entre une action et sa conséquence que si cette conséquence arrive en moins de 2 secondes .
Voilà.
Si votre chien a fait une “bêtise” il y a 1 heure ou même 1 minute, il ne saura pas, il ne pourra pas, associer votre action/réaction à son comportement.

Voici en exemple une erreur courante :

  1. votre chien déchiquette les pieds de la table de salon en votre absence.
  2. Vous rentrez à la maison, quelques heures après.
  3. Là, vous vous mettez en colère contre votre chien.

Que s’est-il passé moins de 2s avant votre colère ?
Vous êtes rentré chez vous.
Donc, votre chien peut apprendre ( et c’est ce qui se passe en général ) que le fait d’être là quand vous rentrez vous met en colère.

Rien d’étonnant alors que les prochaines fois que vous rentrez chez vous, votre chien vous signifie qu’il a peur de vous…qu’il ait fait une “bêtise” ou pas !

De quelle façon punir ?

Il y a 2 façons de punir. Non, ne cherchez pas, il n’y en a pas d’autre! C’est mathématique !

Du point de vue du chien :

  • soit on rajoute quelque chose 2
  • soit on enlève quelque chose 3

Ce “quelque chose” peut être n’importe quoi qui soit perceptible au chien.

Soit on rajoute quelque chose

Pour que ce soit une punition, ce qu’on va rajouter sera aversif, c’est-à-dire que cela ne plaît pas au chien.

Exemples de “choses” qu’on rajoute :

  • du bruit : des cris, une boîte qu’on agite, un klaxon (Pet Corrector), un “pshhhht”
  • de grands gestes
  • des gros yeux, une attitude menaçante
  • des coups (de la chiquenaude sur la truffe au coup de bâton, c’est toujours un coup !)
  • plus généralement de la douleur et/ou de la peur

Maintenant, rappelez-vous : quand punissez-vous ?
Après le comportement de votre chien. Par définition : d’abord votre chien fait quelque chose, ensuite vous le punissez.
S’il voulait obtenir quelque chose avec son comportement, il l’a déjà obtenu ! Par exemple, si vous criez sur votre chien parce qu’il vient d’attraper un bout de poulet, eh bien, il l’a déjà attrapé.

Donc, si vous rajoutez quelque chose pour punir, votre chien a obtenu :

  • ce qu’il veut ( du poulet! )
  • ET en plus quelque chose de désagréable ( vos cris ).

Il vous reste à espérer que la chose désagréable le soit suffisamment pour contre-balancer ce que votre chien a obtenu.
Au cas où vous auriez un doute : il est malheureusement assez courant de voir des chiens le cou brûlé par leur collier électrique lorsqu’ils s’enfuient à travers la barrière de leur jardin pour aller chasser. Une observation qui prouve, très simplement, que le chien est capable de supporter de graves douleurs et blessures pourvu qu’il obtienne ce qu’il veut vraiment : ici, aller chasser le chat du voisin.

Il y a de nombreuses raisons pour ne pas utiliser ce type de punitions! 20 raisons sont développées ici : les punitions sont dangereuses.

Soit on enlève quelque chose

Quelle est donc cette autre option pour punir ?

De façon très simple : on va enlever au chien quelque chose qu’il aime, cette disparition deviendra la conséquence de ce qu’il vient de faire.
Rappelez-vous : vous punissez pour que le chien apprenne à ne plus faire…

Soyons efficaces : que pouvons-nous enlever de pire pour le chien à ce moment-là ? Ce qu’il souhaite obtenir !

Ainsi, s’il souhaite obtenir votre attention en faisant cela, enlevez-lui votre attention.
S’il souhaite obtenir un comportement de votre part, ne le faites pas.
S’il souhaite obtenir un objet, enlevez-le.

Attention à ne pas tout mélanger !
Ce que vous voulez enlever, c’est ce que veut le chien, à ce moment-là, pas “en général” !
S’il veut un objet, n’enlevez pas votre attention ! S’il veut vous toucher, ne restez pas immobile ! S’il veut manger quelque chose, ne lui enlevez pas le jouet qu’il avait 1 min avant !

Exemples :

Votre chien vous saute dessus. Vous voulez qu’il apprenne à ne plus sauter sur vous. Que veut-il ?
S’il veut votre attention : ne le regardez pas, ne lui parlez pas, ne le touchez pas !
S’il veut vous toucher ( parce qu’il aime votre contact! ) : écartez-vous avant qu’il vous atteigne. ( Rappel : cela ne sert à rien de l’ignorer, ce n’est pas ce qu’il recherche… )

Votre chien gratte à la porte. Vous voulez qu’il apprenne à ne plus gratter cette porte. Que veut-il ?
S’il veut que la porte s’ouvre : assurez-vous qu’elle est fermée, éventuellement à clef ! ( Eh oui, votre chien n’a pas forcément besoin de votre participation… )
S’il veut que vous ouvriez la porte : ne l’ouvrez pas tant qu’il gratte, et laissez passer un bon moment ( comptez au moins jusqu’à 5! ) avant de l’ouvrir.
S’il veut votre attention : ne réagissez pas ! C’est peut-être difficile de vous contenir, mais…s’il obtient ce qu’il veut, il recommencera puisque ça marche ! C’est trop difficile de ne pas réagir, peut-être parce que la porte est en bois précieux ? Alors protégez la porte…ainsi vous pouvez ne pas réagir, l’esprit tranquille.

Expérience de pensée

VOUS êtes le héros de cette expérience, que nous allons réaliser ensemble.

J’ai un billet de 100€ en main.
Vous le voulez.
Si, si, évidemment que vous le voulez !
D’ailleurs, je suis disposé à vous le donner…

Vous me bousculez pour avoir le billet.
Je n’aime pas ça : je vais vous apprendre à ne pas me bousculer.

2 possibilités s’offrent à moi :

  • soit :
    je vous crie dessus “Non mais ça va pas ? Arrête-ça ! Tiens, prends-le, va-t-en et ne recommence pas !“,
    et je vous pousse,
    et je vous donne rageusement le billet ( rappelez-vous, j’en avais l’intention! )
  • soit :
    je range le billet dans ma poche en silence
    et je le ressors seulement quand vous arrêtez de me pousser
    et je vous le donne 4

Dans le 1er cas, vous avez eu le fameux billet ! Vous êtes venu pour ça, alors bon, c’était très désagréable, mais vous l’avez eu. Donc, cette méthode ( me bousculer ) fonctionne : vous allez recommencer la prochaine fois…

Dans le 2nd cas, vous n’avez pas eu le billet en me bousculant ! Quoi de plus terrible ? Vous concluez que me bousculer vous fait perdre le billet. Donc, cette méthode ( me bousculer ) ne fonctionne pas : vous n’allez pas recommencer…

Pièges…

Ce qui compte c’est ce que le chien perçoit. Pas votre intention. Et parfois votre action est perçue très différemment de ce que vous imaginez!

Exemple 1

Votre chien vous saute dessus.

Vous pensez que c’est pour obtenir votre attention : vous lui enlevez quand il saute : ne pas le regarder, ne pas le toucher, ne pas lui parler…ça semble une bonne stratégie, d’ailleurs la moitié d’internet vous dit de faire ainsi…

Mais votre chien continue à vous sauter dessus ! Internet se trompe, ça ne fonctionne pas !
Avant de vous précipiter sur l’option “Rajouter des cris et pousser ou taper le chien s’il saute”, ( Rappelez-vous : les punitions sont dangereuses )…
dites-vous d’abord que c’est un indice assez fort qu’il continue, en fait, à obtenir ce qu’il veut en sautant…il est temps de réfléchir à ce que c’est !
( quelques pistes, liste non exhaustive : vous toucher, aller à un endroit précis, attraper quelque chose, vous faire bouger d’une certaine façon… )

Exemple 2

Votre chien tire en laisse.

Option a :
Quand il tire, vous vous faites lourd.
Votre chien ne ralentit pas, ou très peu.
Vous, vous pensez sincèrement que vous avez rajouté un élément aversif ( c’est plus difficile d’avancer ).
Mais peut-être que votre chien considère qu’avancer là où il veut, ou bien à une vitesse qui lui convient, même en devant faire un effort de traction, c’est acceptable. Donc il n’apprend pas à ne pas tirer.
Vous avez d’ailleurs intelligemment noté que votre action punitive a rajouté de la difficulté! (Et ça n’a pas marché…)

Option b :
Quand il tire, vous ralentissez. Beaucoup. Tant qu’il tire, vous ralentissez. Peut-être même que vous changez de direction.
Vous avez enlevé l’élément que votre chien désire : avancer, à la vitesse voulue, à l’endroit voulu.
Votre chien va apprendre à ne plus tirer.

Pour généraliser

La méthode proposée fonctionne parce qu’elle est basée sur les règles universelles 5 de l’apprentissage par association action-conséquence.

Quitte à choisir d’apprendre à votre chien à ne plus produire un comportement, choisissez le plus efficace, en même temps que le plus éthique : faites que la conséquence du comportement soit que le chien perd ce qu’il désire.

D’ailleurs, une fois qu’il produit un comportement qui vous convient, vous allez très probablement lui donner ce qu’il désire. 6 Cela s’appelle…le renforcement positif. L’autre face de la même pièce…mais c’est là une histoire dont nous parlerons une prochaine fois.

MAIS.

S’il-vous-plaît.
N’attendez pas que votre chien produise un comportement indésirable pour le punir.
Apprenez-lui à ne pas produire le comportement indésirable du tout. C’est plus efficace, et plus éthique.

Cela demande de la force et du courage d’être bienveillant et amical. Vous avez ça en vous. Faites-le.

  1. Techniquement, cela s’appelle “agir sur les antécédents”[]
  2. techniquement : P+[]
  3. techniquement : P-[]
  4. sauf si vous me poussez à nouveau bien sûr, là je range à nouveau le billet et on recommence…[]
  5. c’est scientifique. Comme la gravité : ce n’est pas parce que vous ne croyez pas en la force de gravité que vous n’allez pas tomber en sautant de l’échelle…[]
  6. Si c’est acceptable ! Le poulet rôti sur la table, probablement pas, mais une caresse, probablement oui…[]