Passoa, une mascotte idéale

Passoa est une lévrier espagnole, une “Galga”. Nous l’avons adoptée via une association qui permet à des galgos d’être adoptés en France après avoir été recueillis dans un refuge en Espagne, pour la plupart après des maltraitances dont l’horreur frôle l’inconcevable.

Passoa me semble être une mascotte tout à fait adaptée pour représenter ma vision de l’éducation canine, et plus généralement de l’éthique de respect mutuel que je veux promouvoir dans les relations entre humains et chiens, et plus généralement entre humains et animaux non-humains.

Elle a, comme de trop nombreux galgos, souffert de l’attitude parfois barbare d’humains indignes. Je ne sais pas si elle a été torturée à l’instar de nombre de ses congénères, je ne le saurai jamais. En tout cas, à son arrivée, Passoa ne savait pas faire confiance aux humains, ni ne semblait trouver un intérêt quelconque à notre compagnie et notre lieu de vie. Manifestement, une vie de chienne libre et autonome lui semblait plus appropriée ! Depuis elle a quand même trouvé que le confort des canapés et l’abri de la pluie en hiver sont des arguments sympathiques pour rester auprès de ces bizarres bipèdes … ceci dit, il serait aujourd’hui encore totalement irresponsable de la laisser “en libre” hors de la maison.

Et c’est là qu’intervient la seconde facette de Passoa : c’est une lévrier !
Pour qui ne connaît que les races de chiens de travail ou de berger, rencontrer un lévrier et en avoir les mêmes attentes est … disons … une expérience révolutionnaire de remise en question. Non, un lévrier (j’en ai 3 à la maison) ne cherche pas à se “rendre utile” . Un lévrier, c’est un chien à 2 positions seulement, “on” et “off” .
“Off”, c’est un sportif de canapé, qui ne demande qu’un maximum de confort et de sécurité, qui n’accorde sa confiance que du bout des pattes avec les étrangers, d’une gentillesse inconditionnelle avec ceux qu’il choisit, et d’une douceur incroyable envers les humains.
“On”, c’est un état d’excitation maximale, une déconnexion totale du cerveau cognitif en mode prédation, et une vitesse de déplacement hallucinante qui surprend. Récemment, une amie comportementaliste faisait la réflexion suivante : “Tu devrais apprendre à lâcher ta chienne, si elle se balade à 30m c’est pas grave”. Eh bien, 30m, Passoa les parcourt en … 1,8 secondes ? La route qui passe à 300m, elle la traversera dans 18 secondes si elle croit avoir vu une ombre se déplacer plus loin. Il en faut du “courage” pour détacher un lévrier dont la volonté de rester près de l’humain est sans cesse remise sur la balance coûts/bénéfices !
C’est un magnifique cadeau que me fait Passoa quand elle décide, sans que je la rappelle, de revenir vers moi dans un galop sautillant. Si je la rappelle, je perçois distinctement son “et j’y gagne quoi, moi, à revenir maintenant ?” .

Bref, vivre avec un lévrier, c’est comprendre toute la capacité d’autonomie, d’auto-détermination du chien, et que s’il souhaite collaborer avec les humains, il est aussi capable de choisir comment et quand. C’est comprendre que, en tant qu’humain, il est difficile de justifier de brider inconséquemment la liberté d’expression d’un chien. Bien sûr, il est des règles auxquelles la vie en société humaine impose de se soumettre sous peine de conséquences pénibles, voire désastreuses. Passoa a appris à patienter pour sortir ou rentrer dans le jardin (si, si, les premiers mois elle m’aboyait dessus de son cri suraigu pour me faire bouger…) , elle a appris à respecter le chat de la maison même s’il ressemble à un lapin, et tout un tas de choses encore, dont les promenades en semi-liberté munis d’une longe de 15m quand on sort ensemble du jardin.
Ce dont je suis fier aujourd’hui c’est que tout cela, elle l’a appris en toute indépendance grâce à mes indications et à son rythme, et pas grâce à un quelconque contrôle que moi, humain, j’exerce sur elle.

J’ai dû apprendre à lui faire confiance autant qu’elle à moi.
Nous avons dû apprendre à communiquer, chacun vers l’autre, mûs par désir ou bien par nécessité.

Merci, Passoa, de m’avoir fait prendre conscience que rien de ta part ne m’est dû. Tu m’as permis de changer de cap en matière d’éducation canine, et humaine.

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